25/08/2009

VENDREDI 23 OCTOBRE : S’EXCENTRER EN ARCADIE / L'APRÈS-MIDI

14H-18H : TOUT N’EST PAS SI ROSE DANS LES JARDINS D’ARCADIE.
modératrice : Catherine Maumi
Sur quelques expériences arcadiennes, des contre-utopies et leurs dérives autoritaires.
Ettore Sottsass, Il pianeta come festival, 1973
Lithographie mise en couleur par Tiger Tateishi
69 x 52 cm
coll. Centre Goerges Pompidou, Paris

Catherine Maumi
(architecte, chercheur et enseignante)
Entre Wilderness et Jardin du Monde, le mythe d’Usonia. L’Union des États-Unis s’identifie, dès sa fondation, comme la “nation de la nature” ; le mythe sur lequel se fonde la nouvelle démocratie fait référence à celui de la pastorale, à une civilisation constituée majoritairement de petits agriculteurs indépendants, égalitairement répartis sur le sol du Nouveau Monde et s’épanouissant au contact de la nature, loin des vices, corruptions et miasmes de la grande ville. Ce mythe, à l’origine d’une idée du monde habité radicalement différente de celle que l’on connaît alors en Europe, sera qualifié, au XXe siècle, d’anti-urbain. Anti-urbain, en effet, si l’on se donne comme référence le modèle diffusé par la culture européenne. De fait, cet idéal de la Pastorale a donné naissance à un mode d’urbanisation spécifique au territoire des États-Unis, mode d’habiter bien souvent incompris car conçu en opposition à l’idéal promu par la culture européenne.

Xavier Vert
(historien de l’art)
Et in Disneyland ego.
“Il y a quelques années, j’étais assis dans le wagon-restaurant à bord d’un train Southern Pacific qui allait de Los Angeles à Santa Barbara, et j’ai surpris la conversation de Walt Disney, qui s’étendait sur son sujet favori — Disneyland. Il révélait, entre autres, que la peau des singes du Pays de l’aventure n’était pas en fourrure de singe, mais en matière synthétique. ‘– On a essayé de vraies peaux de singe, disait-il. Elles sont devenues miteuses. On a préféré le nylon.’ C’est probablement ça le secret de Disneyland. C’est mieux que la réalité.” (Jack Smith, The Big Orange). Dans l’organisation de ses parties constitutives, le monde voulu par Walt Disney réalise, selon l’analyse méticuleuse qu’en a donné Louis Marin, une forme dégradée de la fiction utopique. Le principe de Disneyland est un principe de mortification : il suppose l’opération réitérée et performative par laquelle l’utopie se dégrade en hétérotopie dominante ou totalisante ou, si l’on préfère, selon laquelle une hétérotopie festive se condense autour du noyau idéologique utopique en l’immobilisant dans le spectacle de sa perfection, de son harmonie. Ce que Paul McCarthy aura perçu mieux qu’un autre et tenté de subvertir par des moyens carnavalesques. Le travail de l’artiste américain consiste alors à réintroduire du jeu entre le fantasme et l’imaginaire, la représentation devenue réelle et le réel devenu représentation, l’accumulation et la consommation, entre le signe et la marchandise, par un dérèglement paroxystique et parodique du lexique et de la syntaxe qui gouverne le bon usage de la totalité. Cette constatation alors : Disneyland exemplifie au temps de l’économie marchande généralisée le destin de toute utopie réalisée.

Roberto Gargiani
(architecte et théoricien)
Il reviendra sur la No-Stop City conçue par le groupe italien Archizoom Associati actif entre 1966 et 1974 à Florence et qui s’associa avec Superstudio pour créer une série de projets de design, de stylisme, d’architecture portés par des visions urbaines à l’échelle d’un territoire sans limites. Si la No-Stop City décrit une ville sans limites, avec éclairage et aération artificiels, à inverse de l’aspect bucolique et champêtre de l’Arcadie, elle ne propose pas moins les conditions d’une vie en rupture avec le reste du monde et constitue une vision critique de la culture de masse qu’elle projette. Une utopie critique destinée à n’exister que sur plan. Archizoom étaient des supporters d’une révolution culturelle promise par Malcolm X. Leurs productions témoignent de leur volonté de produire des objets à haute valeur symbolique et de leur vision pop d’une architecture polychrome, festive, proche de la fête foraine. Ils proposaient des modes de vie pour une humanité libérée des contraintes du fonctionnalisme de l’architecture moderne, luttant pour l’expression de cultures alternatives et pour des modes de vie non conformistes, héritiers d’une contre-culture en opposition radicale avec les visions universalistes des utopies modernes.

Archizoom Associati Dressing Design, 1972
Photo d'Oliviero Toscani dans le studio des Archizoom Associati
vêtements portés par Dona Jordan et un ami des Archizoom

17h : pause / 17h30—18h : discussion